La nouvelle vague n'appartient à personne, ni à un groupe de cinéastes, ni à quelques critiques et exégètes, ni à un pays, ni même une époque. La nouvelle vague est une idée du cinéma: ce qui passe de main en main, de lieu en lieu, et court sur la trame de l'histoire. L'idée n'est pas neuve, et vague: le cinéma, c'est la vie. Il s'est trouvé qu'à un moment, cette idée s'est transformée en pamphlet contre le vieux cinéma et en manifeste d'un nouveau.
Panache et polémiques. Dire «le cinéma c'est la vie», dans la France du milieu des années 50, tenait de la provocation. Cela choquait une tradition cinématographique campée dans ses studios, arrimée à ses vedettes éclairées pile poil, cadrées au cordeau, enregistrées net par une armada de techniciens syndiqués, une tradition aux lettres de noblesse tracées or sur le grand livre de la culture nationale: Carné, Clair, le réalisme poétique, Delannoy, Christian-Jaque et le film historique, Clément, Autant-Lara, Aurenche et le scénario bien ficelé... Comment une idée de cinéma pouvait-elle sérieusement contester les tirades de Gérard Philipe et le regard de Michèle Morgan, les adaptations du Rouge et le Noir et les bouderies du vieux Gabin? Elle le fit pourtant, avec panache. Quelques polémiques, lancées par Truffaut, Rivette, Godard, Chabrol, tout juste 20 ans, montrant leurs dents, sur la couverture jaune des Cahiers du cinéma, 2 000 exemplaires chaque mois, chauffèrent les esprits. L'exercice pratique suivit: si le cinéma c'est la v