Londres de notre correspondant
La marche se voulait pacifique. Elle s'est achevée par un massacre. Le 30 janvier 1972, devenu Bloody Sunday, dimanche sanglant, continue de hanter l'Irlande du Nord. Un moment clé du conflit, remâché sans cesse par les nationalistes, que les Britanniques se sont longtemps efforcés d'oublier. Douleur obsédante des uns, amnésie ou indifférence des autres. A l'approche du trentième anniversaire, un film tente de rapprocher ces deux mémoires.
Reconstitution. Le réalisateur anglais Paul Greengrass n'appartient à aucune des chapelles qui déchirent la province. Son nom est associé à un autre retour sur les lieux d'un crime, raciste cette fois, «l'affaire Stephen Lawrence». Dans Bloody Sunday, il mêle acteurs professionnels et protagonistes du drame anciens soldats britanniques et habitants de Derry et tourne dans les conditions apparentes du reportage, lumière naturelle, caméra à l'épaule.
C'est une reconstitution quasi policière où les responsabilités de chacun sont examinées à la loupe, sans malice ni colère. Paul Greengrass affirme coller au plus près d'une réalité encore controversée. Il s'appuie sur les centaines de témoignages recueillis par une nouvelle commission d'enquête indépendante, présidée par lord Saville. Un immense travail de mémoire initié en 1998 dans la foulée de la paix fragile entre unionistes et nationalistes.
Au début de 1972, la campagne pour que les catholiques bénéficient des mêmes droits civiques que les protestants attein