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Libération
Interview

«Ce film échappe à tous les stéréotypes»

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publié le 13 février 2002 à 22h13

Anne-Marie Bidaud, spécialiste du cinéma arctique, replace Atanarjuat dans une tradition de l'image documentaire inuit, que le film de Kunuk, cependant, bouleverse.

«La production de films inuit existe depuis une vingtaine d'années. Mais ils ne s'intéressaient pas à la fiction. Ils préféraient les documentaires, les films de chasse, de pêche, de rites, de danses, avec beaucoup de dépeçages de phoques, y compris dans un contexte très contemporain: le phoque sanguinolent dans la cuisine en Formica d'appartements modernes. Ces films étaient réalisés quasiment en temps réel.»

Pas de bon sauvage. «Certes, Robert Flaherty, avec Nanook of the North, avait fait événement lors de sa projection en 1922 à New York. Mais ce film fondateur comporte quelques stéréotypes qu'Atanarjuat, notamment dans sa dimension autochtone, a évités. D'abord, la vision idéalisée du primitif, à un âge d'or perdu, celle du "bon sauvage". Dans Atanarjuat, on voit la grande violence de ces cultures, les querelles de pouvoir, le parricide, les meur tres... Kunuk a échappé à un autre écueil, qu'on trouve notamment dans les Dents du diable de Nicolas Ray (1959, avec Anthony Quinn): l'image un peu dégradante, même si elle est folklorique, du primitif "Cromagnon" qui grogne et se roule par terre...

«Autre intérêt du film, qui en fait un film autochtone spécifique: l'omniprésence de la dimension spirituelle. Il emprunte certes beaucoup au cinéma d'action, sans doute influencé par le cinéma américain. N'empêche: pour m