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Libération
Critique

Surpris par l'inuit.

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«Atanarjuat», un pur ravissement, entre conte et western.
publié le 13 février 2002 à 22h13

Rester planté trois heures devant un film inuit ­ quand bien même affublé du titre de «premier de l'histoire» ­ n'est pas une activité, en soi, qui s'impose comme une évidence. A tort. Car Atanarjuat, avec son titre impossible (moins facile, en tout cas, qu'Astérix ou 8 Femmes), relève du pur ravissement, dès l'instant qu'on daigne se laisser happer par ces images dont l'indéniable beauté déjoue pourtant d'emblée tout formalisme.

Scène rituelle. Point d'aurore boréale, ici, ni de catastrophe naturelle ou de combat épi- que contre quelque ours issu de la trivialité hollywoodienne. Non, juste une image de banquise, pénombreuse et floue, où les nuances bleutées des éléments fusionnent en une intemporalité glaciale immédiatement perceptible. Puis, une scène rituelle d'intérieur, dont le caractère à la fois étrange et fascinant est amplifié, forme et fond confondus, par la lumière orangée des lampes à huile de phoque et le grain de l'image.

Dix minutes à peine et le tour est joué: chaînon marquant entre Robert Flaherty et Sergio Leone, Atanarjuat va s'imposer comme un captivant récit, nourri de la dimension ethnographique permettant de situer le projet aux confins exacts du documentaire et de la fiction. Voire de la mythologie, puisque l'histoire ­ non datée, même si l'on estime que son origine remonte à environ cinq cents ans ­ tient autant de l'épopée antique que du western, du conte multiséculaire que de la parabole. Moins manichéenne que simple, la Légende de l'homme rapide (le