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Libération
Critique

«Phèdre», défie le trivial.

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publié le 23 février 2002 à 22h22

envoyée spéciale à Bourges

Entre deux panneaux de lumière, une étroite passerelle surélevée divise par le milieu la salle tapissée de drap blanc, de chaque côté sont assis les spectateurs. Le dispositif évoque le Nô, tout comme les traits de musique qui scandent les va-et-vient des personnages. Tout comme leurs vêtements, plus proches du prêt-à-porter japonais que des fastueux costumes traditionnels. C'est ainsi qu'avance la Phèdre mise en scène par Christian Rist, à la frontière du rituel tragique et du fait divers trivial.

De quoi s'agit-il? D'une histoire de famille, d'une affaire d'ambitions qui se déchaîneront a l'annonce de la mort du Père (Thésée). D'une femme mariée trop jeune (Phèdre), enfant gâtée, surprotégée, dont le caprice tourne à l'obsession destructrice. Elle veut Hippolyte, fils mal aimé qui se dresse sur la pointe des pieds comme pour se hisser à hauteur d'un pouvoir dont il rêve, et envisage d'épouser Aricie, bimbo calculatrice.

Christian Rist cite Francis Ponge: «Mon vice (et ma vertu), mon tourment est assurément de croire qu'on puisse insérer l'audace et la subversion dans une forme parfaite.» Donc, à cette façon de convertir l'intrigue en drame bourgeois au bord du sordide, se superpose la forme parfaite du langage racinien. Tel est le pari du spectacle, son défi, son intérêt, sa force. Les comédiens assument le risque, donnent la miraculeuse musique de l'alexandrin, tout en laissant leur personnage se débattre sans noblesse. Ponctué de gifles, l'aveu de