Huit cents kilomètres, c'est la distance qui sépare Paris des environs de Marseille, et plus loin, de Claviers, petit village du haut Var où la cinéaste Claire Simon a entrepris de filmer l'histoire d'amour entre Greg (17 ans), garçon du coin, et Manon (15 ans), vacancière. Comme il est précisé assez vite, au fil d'une conversation, que Manon n'est pas seulement la fille de Paris mais aussi la fille de Claire Simon, la distance n'est pas que kilométrique. C'est peut-être ça le sujet du film: comment trouver ses marques, fomenter l'espace où peut naître géographiquement une histoire de cinéma.
Grande dormeuse. Claire Simon évoque deux tempêtes qui auraient pu l'engloutir: «Etre mère détruit la cinéaste, être cinéaste détruit la mère.» Entre ces deux naufrages, le film invente son embellie, une intimité sereine qui n'est pas pour autant un calme plat. C'est pour ça qu'on s'y intéresse. Pourtant, vu de loin, dans cette autre distance privée qui sépare un spectateur d'un film, rien de spécial à signaler.
Manon est une jeune fille qui s'habille (street girl), parle («c'est trop!»), téléphone (sur l'inévitable portable, «t'es où là?»), comme beaucoup de jeunes filles de notre temps. Sa seule singularité, peut-être, c'est de dormir beaucoup, de bâiller énormément, d'avoir beaucoup de mal à se réveiller. Sinon, dès qu'elle s'est ébrouée, Manon est très amoureuse de Greg, un grand gars brun qui, lui non plus, n'est pas spécialement rebelle aux tocades de son âge: scooter, foot, pizza,