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Libération

La Suisse tirée à quatre langues

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Expo02 déchire la carte postale de la Confédération neutre.
publié le 1er juin 2002 à 23h48

Neuchâtel, Bienne et Morat

envoyé spécial

«Excusez-moi, madame, mais quel est le message ?» Sac au dos, consciencieux, l'homme est visiblement déboussolé par ce qu'il voit : «C'est une fraise, qui ne ressemble pas à une fraise, n'est pas une fraise, mais a le parfum de fraise. A chaque visiteur de faire la synthèse entre ce qui est de l'ordre de l'artifice et de la nature», lui répond très professionnellement l'hôtesse du stand. Un peu ébranlé, le visiteur hoche la tête et poursuit son chemin, entre robots, interpellations diverses («un Suisse sur deux a une voiture», «Deux adolescents sud-africains sur trois mourront du sida») et architecture lacustre, comme une envie d'horizon dans un pays bouché par les Alpes.

Dire que l'exposition nationale suisse, baptisée Expo02, qui se tient durant 159 jours en cinq lieux différents (Neuchâtel, Bienne, Yverdon, Morat et le Jura), déroute les dizaines de milliers d'Helvètes qui la visitent chaque jour est un euphémisme. Dans une nation tiraillée entre ses quatre langues, ses religions et la force de ses particularismes cantonaux, les expositions nationales que la Suisse a connues aux XIXe et XXe siècles ont eu un seul enjeu idéologique, mais de taille : participer au ciment de l'identité helvétique. Ce fut toujours la célébration de la «suissitude» et du progrès technologique, les deux mamelles de la Suisse moderne, que ce soit en 1883, en 1896, à la veille du déclenchement des deux dernières guerres mondiales, et une dernière fois en 196