C'est une vaste salle de classe que le scénographe Gérard Didier a installée pour Jean-Claude Fall dans la cour du lycée Saint-Joseph. Quarante pupitres où sont affalés, la tête entre les bras, autant de personnages immobiles tels des mannequins, vareuses militaires pour certains, costumes kolkhoziens pour les autres. Dans le fond, d'immenses tableaux noirs coulissants portent en exergue une citation des deux auteurs au programme : «Ah ! Nous, qui voulions préparer le terrain pour un monde amical, n'avons pas pu être amicaux», écrivit Brecht dans un poème. «L'herbe même, il nous faut l'arracher afin qu'elle reste verte.» : la phrase est le leitmotiv de Mauser de Heiner Müller.
Polycopier. Une leçon d'histoire dans une «classe morte» (allusion à la pièce homonyme de Kantor) : ainsi se présente le spectacle de Fall qui tient à la fois de l'exhumation et de la purge. Tel un Jean-Marie Villégier cherchant à reconstituer le théâtre comme il se jouait au XVIIe siècle, le directeur du centre dramatique de Montpellier semble s'être attaché à polycopier un spectacle soviétique des années 30. La Décision appartient aux pièces «didactiques» de Brecht, qui visaient explicitement à l'éducation des masses. Elle fut créée en 1930 sous la forme d'un oratorio mis en musique par Hanns Eisler. Jean-Claude Fall a donc fait appel à des musiciens, dirigés par Stephen Warbeck, et à l'Ensemble choral universitaire de Montpellier pour épauler les camarades comédiens. La pièce raconte la virée d'un tr