Claire Lasne, directrice depuis quatre ans du centre dramatique Poitou-Charentes, aime la troupe. Comédienne, ancienne élève du Conservatoire, elle travaille depuis des années avec une même famille nombreuse d'acteurs. A Poitiers, ils sont vingt-cinq, qui ont créé quatre spectacles en deux ans et qui, surtout, le printemps venu, sillonnent les localités de la région avec un chapiteau. En Avignon, celui planté dans le parc des expositions manque d'ombre les jours de chaleur, et se transforme en étuve le soir. Ce désagrément mis à part, on peut sans crainte s'installer sur les gradins autour de la piste. Et suivre un Dom Juan de Molière plus remarquable par le jeu des acteurs que par le dispositif scénique (le cercle se révèle monotone, même s'il offre une multitude d'entrées et de sorties).
Soit, donc, un Dom Juan (Richard Sammut), tout de noir vêtu, séducteur et voyou, plus instinctif que calculateur ; un vrai chasseur, qui s'amuse toujours autant à guetter sa proie, mais qui est rattrapé par l'instinct de mort (quand il accepte de dîner avec la statue du commandeur) qui le perdra. Ce dépressif qui s'ignore est flanqué d'un Sganarelle (Laurent Ziserman) qui a du mauvais garçon l'attirail (casquette et veste à carreaux) et la dégaine, mais pas l'état d'esprit.
Ce couple de paumés en vadrouille se révèle au bout du compte plus attachant qu'inquiétant ; il fait merveille dans la scène où Dom Juan éconduit son créancier, Monsieur Dimanche, un peu moins au moment de la descente