Menu
Libération
Critique

«Visites», rendez-vous avec l’absence

Article réservé aux abonnés
AVIGNON. Secrets familiaux et verbe déroutant du Norvégien Jon Fosse.
publié le 22 juillet 2002 à 0h28

Deux femmes, mère et fille, sous le même toit. La première se désespère de voir l’autre ne rien faire sauf errer la nuit, dormir tout le jour et se faner entre quatre murs à ne jamais voir personne. Deux hommes leur rendent de temps en temps visite, le fils et l’amant de la mère qui s’affronteront peut-être. La fille va avoir 19 ans. La mère organise une fête. Il ne viendra personne.

Minimale à l'extrême, l'écriture du Norvégien Jon Fosse construit une partition du doute basée sur la répétition de menues variations qui semblent se répondre d'ailleurs d'une pièce à l'autre. Ainsi certains passages de Visites, que Marie-Louise Bischofberger vient de créer à Avignon, rappellent fortement l'incroyable Quelqu'un va venir, monté par Claude Régy, qui avait révélé Fosse en France.

«La Fille : il ne viendra sans doute personne/La Mère : bien sûr qu'ils vont venir/ils ont bien dit qu'ils viendraient [...] ils l'ont bien dit/La Fille : Mais ils ne viendront pas/La Mère : pourquoi/s'ils l'ont dit/c'est qu'ils viendront/tout de même/ils ont dit qu'ils viendraient/ou pas.»

Quelques centaines de mots à peine suffisent à composer le motif central du texte d'où sourd l'effrayant silence d'une parole muette. Une langue de l'absence qui porte dans son mouvement même sa propre impossibilité. Un monde de l'évitement aux personnages équivoques qui ne finissent jamais leurs phrases. L'horreur est tapie derrière la porte de cette chambre d'enfant que l'Homme ne supporte pas de voir ouverte. Il règne u