Menu
Libération
Critique

Faytinga, porte-voix de la guérilla

Article réservé aux abonnés
publié le 23 juillet 2002 à 0h29

Peut-on avoir les traits aussi purs et la voix aussi claire après tant d'années de guerre ? Faytinga a 39 ans, dont quatorze passés dans la guérilla indépendantiste érythréenne. Quatorze années à arpenter le bush en sandales dans la fournaise ou par les nuits glaciales des hauts plateaux, à se cacher dans des grottes pour échapper aux bombardements des Mig éthiopiens, à chanter de village en village pour ranimer la flamme des paysans accablés.

Vitrine. Faytinga, chanteuse érythréenne, est un mythe national. Elle est aussi la figure avenante d'une dictature paranoïaque et inflexible, un régime d'anciens maoïstes qui ont libéré leur pays avec des moyens dérisoires face à la plus puissante armée d'Afrique, celle du «négus rouge» Mengistu, armé et soutenu par l'Empire soviétique tout au long d'une guerre civile de trente ans qui s'acheva par la chute d'Asmara en 1991, quelques mois avant celle de la capitale Addis-Abeba.

Deux ans plus tard, l'Erythrée, l'ancienne colonie italienne, devenait indépendante, cas unique de modification des frontières héritées de la colonisation en Afrique. Le jeune pays offrait naturellement le pouvoir à des libérateurs intègres et courageux à qui rien ne paraissait impossible et surtout qui n'avaient besoin de personne ; mais l'autosuffisance a viré à l'autisme, la solidarité à la dictature. Faytinga, elle aussi, est un pur produit du Front populaire de libération de l'Erythrée dont elle connaît les dirigeants, jusqu'au jeune président Issayas Afework