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Libération

George Tabori, son théâtre rescapé du désastre

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Un virtuose de la dérision.
publié le 24 juillet 2002 à 0h29

Né à Budapest en 1916, grandi à Vienne, installé à Londres où il a pris la nationalité britannique, auteur de théâtre à New York, scénariste à Hollywood, metteur en scène à Berlin : George Tabori n'a jamais cessé de poser dans son théâtre les mêmes questions que dans sa vie : «Qui suis-je ?» Les réponses sont aussi aléatoires que ses personnages, qui fonctionnent selon le principe du couple opposé : Lobkowitz-Dieu et Shlomo le vendeur de bibles dans Mein Kampf (farce). Ou Weisman le Juif new-yorkais et Copperface l'Indien dans la pièce qui porte leurs noms. Ou Hamm et Clove dans Fin de partie. La pièce de Beckett, mais telle que Tabori l'avait mise en scène et adaptée : réduite aux deux compères qui, tout d'abord, discutent pour décider de ce dont ils auraient besoin pour jouer Fin de partie...

En résumé, face à face, un fort et un faible détournent des règles qui ne sont pas données. De sorte que l'on ne sait jamais où se situe «l'échec et mat», ni lequel triche, alternativement bourreau et victime. Le but du jeu : la fusion en une entité, la destruction de chacun. L'écriture de Tabori suit, avec ce qu'il faut de dérision, le vertigineux labyrinthe d'un humour fondé sur la contradiction. Plus que de Woody Allen, auquel parfois on le compare, Tabori serait proche d'Isaac Bashevis Singer, inventeur d'histoires improbables. Quoi de plus improbable que l'histoire vraie de la mère de Tabori, sauvée aux portes d'Auschwitz par un officier nazi qui la raccompagne ensuite à Vienne ?