Salvador Dali pince son sourcil. Stravinsky se tient la tête, ou prend la pose surnommée «européenne» : bras croisés haut sur le torse. Woody Allen écrit au lit, l'oreille dans la main. Clinton se frotte le menton... L'Américain Arnold Newman qui, depuis soixante ans, photographie les célébrités du monde entier pour des magazines tels que Life, Harper's Bazaar, Esquire... ne recherche pas particulièrement l'instantanéité, la spontanéité. Le sujet, saisi dans son cadre habituel (son atelier, sa maison ou son bureau), dirigé comme par un metteur en scène, ne bouge pas aux moments indiqués et collabore à la création d'une image minutieusement contrôlée par le photographe.
Nature morte. Aujourd'hui, Arnold Newman (84 ans), qualifié de père du portrait environnemental, se rappelle chacune de ses photos, les circonstances exactes qui les ont vues naître. «J'ai commencé par faire de la peinture, explique le vieil homme, de passage à Paris avec sa chère Augusta, son épouse depuis cinquante-trois ans. Et je pense toujours en termes de composition. Mais surtout, une photo doit être faite avec la tête et le coeur, et en s'amusant.» S'amuser, pour Newman, c'est donc d'abord bien observer l'environnement dans lequel vit son sujet. Comprendre les relations entre ce cadre habituel et l'homme ou la femme qui est face à lui. Newman refuse le terme d'accessoires, il se contente de déplacer les objets présents, comme s'il devait réaliser une nature morte, où l'être humain se fondrait dans ce qu