Francis Bacon n'avait jamais vu en vrai l'Autoportrait sur la route de Tarascon peint par Vincent Van Gogh durant l'été 1888, lors de son séjour à Arles. Et pour cause : le tableau fut détruit par le feu au Kaiser Friedrich Museum de Magdebourg, bombardé en 1945. Il n'en connaissait qu'une reproduction en couleurs. Grand admirateur de Van Gogh, il était fasciné par cette image troublante, cette silhouette de l'artiste errant sur la route avec tout son barda de peintre, son chapeau de la couleur du champ de blé, en arrière-plan, et son ombre noire (son double sombre), très forte, au premier plan. «J'avais toujours aimé ce tableau. Et comme rien d'autre n'avait marché, j'ai eu l'idée de tenter quelque chose là-dessus. J'ai toujours préféré le Van Gogh des débuts, mais ce personnage hanté sur la route me paraissait convenir tout à fait, à ce moment-là tel un fantôme de la route, pourrait-on dire», confiera Francis Bacon (1). Au printemps 1956, il s'attaque donc à la première des huit toiles qu'il va réaliser en peu de temps, un peu plus d'un an d'après cet autoportrait. Elles seront exposées en 1957, à la Hanover Gallery de Londres, en faisant sensation compte tenu du sujet, de la touche et des couleurs expérimentés par Bacon. Depuis cette date, la série n'avait jamais été montrée dans son ensemble.
Pathos. L'exposition Van Gogh vu par Bacon, sous-titrée «La série des Van Gogh sur la route de Tarascon», les rassemble donc pour la première fois en France. Elle est organisée