Auteur de théâtre prolixe et acteur jubilatoire de ses propres textes, Serge Valletti cache sa pudeur sous une humeur de Marseillais. Le plus intime, il ne le confie qu'au roman, comme on se parle entre quatre yeux, pas très loin de l'autobiographie. Ce besoin de délestage en marge des planches est venu sur le tard. Le premier roman, édité en 1995, Pourquoi j'ai jeté ma grand-mère dans le Vieux-Port (1), raconte l'enfance dans la cité phocéenne. Et puis quand le jour s'est levé, je me suis endormie déroule la suite à la manière d'un roman d'apprentissage tragi-comique, sauf qu'ici encore il avance masqué. Le narrateur est une narratrice.
Galère. On découvre sa «montée» à Paris, les plans galère «rue Campagne-Première. Un cinquième étage sans ascenseur. Avec l'escalier qui arrivait presque sur le lit. Que quand tu avais fermé la porte, il ne te restait que la poignée comme meuble tellement la piaule, elle était petite». La naissance d'une vocation, les premiers pas sur les planches : «Le professeur, qui était plein de poils partout avec des chemises ouvertes sur une chaîne en or, se vantait de venir directement du Berliner Ensemble. Sur le trottoir, devant la salle, il avait installé un petit chevalet vert-pancarte avec des photos de lui au Berliner Ensemble. Comme c'étaient des portraits en gros plan de sa gueule maquillée à la truelle, il aurait bien pu marquer qu'il avait fait le cirque de Pékin, personne n'aurait pu dire le contraire.» Et première «grande leçon» de théâtre