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Libération
Critique

Les apparitions de Giacomelli

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publié le 15 octobre 2002 à 1h25

Le grand sujet de Mario Giacomelli (1er août 1925- 25 novembre 2000) est le temps. Il passa le sien à Senigallia, son village natal du centre de l'Italie, à part quelques escapades à Lourdes, au Tibet et en Ethiopie. Ses photographies, organisées en série, sont l'exact reflet de ce qu'il a vu et, curieusement, chacun peut se reconnaître dans l'un de ses multiples clichés comme si Mario Giacomelli avait, à lui seul, sur un tout petit territoire, saisi une Italie éternelle, celle de nos pensées. Paraît aujourd'hui un livre qui raconte, en 684 illustrations, la géographie naturellement humaine de cet homme épris de poésie et qui, selon les mots même de la galeriste Agathe Gaillard, organisatrice d'une de ses dernières expositions parisiennes, avait «un regard fraternel, magnifique».

Le temps, donc, qui relie l'oeuvre de Giacomelli comme un fil d'Ariane, ce temps qui lui fait peur et qu'il n'hésite pas à affronter dès ses débuts à l'hospice de Senigallia, où sa mère a travaillé.

Pavese. En 1954, un an après l'achat de son premier boîtier pour 800 lires, un Comet Bencini, il commence à photographier les pensionnaires. Cela s'appelle La mort viendra qui aura tes yeux/ Verrà la morte e avrà i tuoi occhi, en hommage à Cesare Pavese. Corps défaits, bouches ouvertes, êtres abandonnés, tout est implacable, c'est la mort en direct. Pourtant, d'après lui, le plus important n'est pas sur la pellicule. Comme cette femme qui attend la visite de son fils, en vain... Plus tard, à Lourdes, Giaco