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Libération
Critique

Bond dans son cabinet noir

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Théâtre. A Alfortville, une pièce inquiétante du dramaturge anglais.
publié le 19 novembre 2002 à 1h49

Sifflotement au loin, bruit de pas dans la rue. Plus tard : «Un coup de feu. Le corps s’effondre.» Existence, la dernière pièce, inédite encore (à paraître à l’Arche), d’Edward Bond s’inscrit dans l’intervalle. Une quinzaine de pages serrées sur une situation intimiste : «x un jeune homme ordinaire/Tom/Ville/Maintenant.» Ni tribu d’humains en survivance dans un monde postnucléaire, ni climat néofasciste d’une équipée de soldats, cette fois le dramaturge des Pièces de guerre ouvre la porte d’à côté pour y planter une histoire affreusement banale qui, lorsqu’elle démarre, pourrait bien arriver à n’importe qui.

Il faut bien observer le décor ­ lit, chaise, téléviseur ­ quand on s'installe sur les gradins du théâtre-studio d'Alfortville ­ où la pièce est créée pour la première fois ­, parce qu'on ne le reverra pas de sitôt, du moins pas en l'état. La quasi-totalité du spectacle se déroule dans le noir. Ce parti pris radical du metteur en scène Christian Benedetti a pour effet d'englober acteurs et spectateurs dans un seul et même espace d'inquiétude.

Am-stram-gram. Lorsque x (Vincent Ozanon) s’avance, entre dans l’immeuble, monte les escaliers, pousse la porte, insère une barre de métal entre la porte et le chambranle ­ long prélimi naire que Benedetti règle très astucieusement par la bande-son ­ lorsqu’il avance à tâtons, ouvrant un tiroir puis l’autre et fouillant, on éprouve fortement la violence de l’arbitraire qu’exerce x sur Tom (Rémi Pous) : «Am-stram-gram : toi.» La