Longtemps Dario Argento fut un oublié de la critique de cinéma. Le cinéaste italien avait son public, fans du sang qui gicle, et quelques aficionados qui voyaient déjà en lui un génie du meurtre filmé. La tendance s'est aujourd'hui inversée, paradoxe de la cinéphilie : quand Argento semble avoir le plus grand mal à conserver son public populaire, il a conquis un à un les bastions critiques. Jean-Baptiste Thoret est l'un des artisans de cette métamorphose, et ce livre, qui suit de près un documentaire qu'il a réalisé en 2001, Soupirs dans un corridor lointain : les songes de Dario Argento, est la consécration d'un patient travail de reconnaissance.
Car Dario Argento, qui oeuvre depuis 1969, avec constance, dans le giallo, le slasher, le thriller d'épouvante, est désormais compris comme l'une des clés qui ouvrent à la modernité du cinéma. Celle de la forme souveraine : un meurtre, un effroi chez Argento est pure mise en scène, couleurs, déplacements, regards, sons, érotisme, terreur, jouissance. Rien ne compte d'autre que ce défi formel qui nargue les tenants de l'académisme comme des grands sujets.
Quasi fétichiste. C'est ce dont rend admirablement compte ce livre. Les analyses de la forme argentienne, telle qu'elle s'enroule autour de figures, de motifs, de personnages, de gestes, de thèmes, d'illusions et d'extravagances, sont menées avec une finesse quasi fétichiste et une sophistication dans le détail. Et la forme de l'ouvrage, avec ses nombreuses séries de photogrammes aux