envoyée spéciale à Carquefou
Orlan s'est rendue très célèbre au début des années 90. A cette époque, en effet, l'artiste avait effectué une série d'opérations chirurgicales, sept en tout, qui ont transformé son apparence, désormais l'incarnation claquante d'un composite de madones peintes (ce qui permet de vérifier que la peinture est toujours une abstraction) et de Star Trek (deux bosses en silicone qu'elle a fait implanter au-dessus des sourcils). Orlan a, à l'époque, commis une double transgression. D'abord, elle a fait autrement ce que tant d'autres, hommes et femmes, font depuis. En ce qui la con cerne, c'était sans se conformer aux canons de la chirurgie esthétique, qui modifie silencieusement hommes et fem mes selon une image conforme aux fantasmes les plus éculés de l'érotique judéo-chrétienne. Deuzio, Orlan a outrepassé les règles implicites du monde de l'art, elles aussi fort judéo-chrétiennes : «Tu sublimeras, c'est-à-dire ne toucheras point à ton corps durablement». Preuve en est donnée par les réponses embarrassées sinon affligeantes, dont les nôtres, à la question qu'elle a posée à tous les critiques d'art en France et plus: «Qu'est-ce que vous en pensez ?» , interrogeait-elle inlassablement, pour la plus grande horreur des personnes confrontées à leur embarras («"ça", un travail ?»). Seulement voilà, la médiatisation d'Orlan s'est opérée de façon spectaculaire : elle a tenu le coup et avancé d'autres pions.
Outre mesure. Dans les belles salles modernistes de Car