Un Arlequin de fortune entame une course-poursuite avec un cafard. Rien de plus banal dans ce jeu de grimaces et de langue pendue, le regard cerné par le masque de cuir, que cette pantomime exécutée par un boiteux. Assis sur la scène vide, dans son collant à pois inepte, il balbutie quelques grognements. Puis une crampe le saisit, il se tord en deux et gifle son chapeau de feutre, avant de crier d'une voix d'outre-tombe : «Le spectacle est fini, c'est fini.» Arlequin en a marre. Il rêve de dire du Shakespeare ou du Corneille, désire les lumières pour lui tout seul. Et ce n'est pas cette bête rampante que l'on veut le forcer à avaler qui changera le cours des choses.
Comptine. Didier Galas est ce Petit (H)Arlequin qui pète les plombs, fatigué de jouer les pitres et les faire-valoir depuis des siècles. A priori, mettre en scène l'une des figures les plus connues, mais aussi les plus datées, du théâtre populaire relève de la coquetterie d'initiés. La grande force de Galas est, par un jeu qui brouille les pistes et les répertoires, de rendre actuelle cette comptine d'une petite révolte quotidienne. Une histoire à tiroirs où l'on ne sait plus si le personnage qu'on dévisage est l'acteur, l'Arlequin, un des comédiens qu'il parodie ou l'homme qui se grime avant d'entrer en scène.
Dans ce jeu finaud du «qui est qui ?» et du «qui voit-on ?», Didier Galas fait intervenir quatre siècles de tradition littéraire et théâtrale. Les auteurs tout d'abord : Goldoni, Marivaux ou Molière, maîtres