Berlin envoyé spécial
Le titre du nouveau film de Vincent Dieutre, Mon Voyage d'hiver, indique clairement qu'il nous fait donation de son intimité. Ce voyage de Paris à Berlin en passant, entre autres, par Weimar et Dresde est son voyage d'hiver à lui. Comment s'y prend-t-il pour qu'au bout du chemin ce périple soit devenu le nôtre ? D'abord, en prenant au sérieux la notion de véhicule. C'est en voiture que Dieutre se déplace. Une sorte de travelling permanent qui n'est pas seulement une affaire de morale mais, en l'espèce, de carburant, d'essuie-glace (il neige en Allemagne l'hiver), de chômage et de buée sur les vitres. Nous voilà donc physiquement embarqué. Plutôt sur la banquette arrière (la fameuse place du spectateur ?). Car, à l'avant, à la place du mort, il y a un passager presque clandestin, Itvan, un adolescent que sa mère a demandé à Dieutre de convoyer jusqu'à Berlin. Le réalisateur s'adresse à lui et, par-dessus son épaule, comme dans la Lettre à un jeune poète, à sa propre jeunesse.
Graffiti. Dieutre écrit bien et nous le fait entendre : il était une fois la vieille Europe centrale où Weimar rime forcément avec Goethe et Rosa Luxemburg, où Dresde évoque fatalement sa destruction inutile par les bombardements alliés. Mon Voyage d'hiver est une leçon de savoir vivre l'Allemagne : la prendre pour tout ce qu'elle est. Le pire, quand, au hasard d'un panneau de signalisation, on frôle la mort et ses camps ou, quand, sur les murs, des graffitis néonazis nettement plus c