Muscles Shoals («bancs de muscles», comme un banc de poissons) est un spectacle limite. Non que ces limites soient celles de l'extrême. On n'y voit ni sang, ni tripes, ni tragédie, mais pas non plus le contraire, une ligne sèche, aride, difficile. Muscles Shoals joue avec les limites comme on s'amuse avec un élastique. D'ailleurs, la qualité d'un muscle ne se mesure-t-elle pas à son élasticité ?
Costumes «Ab-Fab». Première tension : l'âge des capitaines, à cheveux poivre et sel. Quelle allégresse que de voir arriver sur scène le saxophoniste-soprano Steve Lacy (et la claveciniste Petja Kaufman), qui se met à jouer. Puis, Douglas Dunn va danser, alors que Charlie Atlas, qui a réalisé des costumes Ab-Fab (perruques sixties orange et rose, collants troués, protubérances...), oeuvre à une régie mêlant images live et paysages scannés sur grand écran. Carol Mullins a réglé les éclairages.
Tous les quatre illustrent un des moments forts de la danse postmoderne new-yorkaise des années 70 : Douglas Dunn, Californien né en 1942, travailla avec Yvonne Rainer et Merce Cunningham et fit partie du collectif Grand Union (1970-1976). Un premier film avec Charles Atlas, cinéaste fameux de Cunningham, date de 1972, Mayonnaise, Part 1. Carol Mullins fut l'éclairagiste de cette aventure new-yorkaise. Quant au jazzman Steve Lacy, il entre dans la danse en 1984. Mais ils ne se reposent sur les lauriers du regain de ferveur qui touche actuellement les expériences d'improvisation des années pionnière