Entre un dock où s'inscrit l'histoire portuaire de Rotterdam (Java, Bornéo, Célèbes) et une splendeur architecturale contemporaine dont la deuxième ville des Pays-Bas a le secret, sprintent trois individus, chacun accoutré d'un ordinateur greffé à la manche, d'un système de localisation par satellite (GPS) et d'un appareil photo numérique. L'un d'eux s'arrête, clichète un espace vide de présence humaine, annonce la capture de Maria.
A l'intérieur de Las Palmas, le bâtiment décati qui accueille le Dutch Electronic Art Festival (DEAF), ancêtre des manifestations internationales liées à la culture numérique, Maria vient d'être sortie du jeu, face à son écran de visualisation en 3D de Rotterdam. Son double numérique a été repéré par l'un des «runners» de Blast Theory, un collectif d'artistes britanniques. «Can you see me now ?» fait se rencontrer des mondes a priori étanches, l'espace réel, tangible, et l'espace virtuel, où se perdent les aficionados de jeux vidéo.
Instabilité. La proposition extrême de Blast Theory est l'une des variations artistiques autour du thème 2003 du DEAF, «Data Knitting» (pour «tricotage de données»), un concept moins technoïde qu'il n'y paraît. «N'est-il pas étrange que, dans nos sociétés hypermédiatisées, si peu de gens s'intéressent aux croisements des bases de données, à leur réalité sociologique, économique et politique ?», interroge Alex Adriaansens, directeur du V2, le centre de création et de recherches créé en 1981 par une poignée d'artistes pré