Passager clandestin du monde de l'art, Louis Soutter (1871-1942) revient sur terre. Après le Kunstmuseum de Bâle, Lausanne lui rend hommage en deux expositions et 300 oeuvres. La première s'attache à montrer sa singularité, de ses premiers dessins à la plume sur des cahiers d'écolier aux dernières peintures tracées avec les doigts. La deuxième s'essaie, face à l'explosion anticonformiste de ce créateur vaudois, de le confronter aux artistes de son époque, René Auberjonois, Juan Gris, Marcel Poncet ou Georges Rouault, dont il fut l'exact contemporain. Une démonstration difficile à appréhender tant Soutter vole la vedette aux artistes patentés avec son oeuvre littéralement éblouissante, sauf peut-être avec Poncet et ses scènes de bordel qui sont dans la même veine que les filles vues par Soutter, cruelles et ironiques. Mais les deux expositions, réalisées de concert et complémentaires, révèlent surtout le destin d'un homme né pour être pharmacien, comme son papa, et qui mourut dans l'asile où sa famille l'avait placé, seul et pratiquement aveugle après avoir enfanté plus de 12 000 dessins.
Deux photographies. Sur la première, en 1891, il a 20 ans, et un profil de joli garçon avec l'avenir devant lui. Il veut être violoniste, ou peintre, hésitation, bientôt, il partira en Amérique, y épousera miss Madge Fursman, et dirigera le département des beaux-arts du collège de Colorado Springs.
Elégance. Sur la deuxième, en 1937, il lui reste cinq ans à vivre dans cet hospice de Ballaigues