Avant la dispersion aux enchères de la collection Breton, Jean-Jacques Aillagon avait promis d'enrichir le patrimoine public de plusieurs ouvrages et de prêter assistance aux villes qui souhaitaient se porter acquéreuses. Aussi la vente est-elle devenue un théâtre d'ombre dans lequel se disputent les autographes. En principe, les préemptions sont affaires secrètes. La ville de Nantes a fait très fort, puisqu'elle a annoncé par voie de presse la liste de ses préférences. Les conservateurs espèrent ainsi décourager les enchérisseurs. Les marchands prennent leur revanche en portant les enchères au-delà du raisonnable, pour être sûrs d'emporter une édition originale du Manifeste du surréalisme (1924). Un libraire a ainsi doublé sa propre enchère, à la surprise générale : de 5 000 à 10 000 euros, soit six fois le prix de l'estimation.
Prix modiques. Ces pieds de nez n'empêchent pas bibliothèques et musées d'emporter plusieurs volumes, notamment ceux dont André Breton était l'auteur. A l'image de Nantes, avec Péret et Vaché (Libération d'hier), les municipalités sont à l'affût d'oeuvres de leurs natifs : pour quelque 250 euros, Grenoble a emporté cinq livres de Stendhal ou consacrés à lui ; Reims a hérité pour 300 euros d'un livre de René Daumal, fulgurant poète surréaliste mort de phtisie à 36 ans. Le musée Picasso s'est attaché à une Petite Anthologie du surréalisme de 1934, car elle contenait une eau-forte de Picasso sur laquelle il avait effectué un collage. La bibliothèque Dou