La vente aux enchères de ce qui restait de la collection d'André Breton dans son appartement du 42, rue Fontaine, trente-sept ans après sa disparition, a été un événement dont la portée a dépassé tout le monde. Après deux décennies d'oubli relatif, le théoricien du surréalisme est revenu au premier plan de l'actualité.
Peu se doutaient de l'existence d'un tel trésor, même si les oeuvres marquantes étaient prêtées à chaque exposition. Les experts ont mis six mois à tout dépouiller. Breton gardait tout, de la moindre note au souvenir de voyage (du moins quand il ne se fâchait pas avec les auteurs). Que cette mémoire pût ainsi être dispersée a choqué. Divisée, violente dans ses propos, la contestation est retombée dès le premier jour d'une vente-marathon de deux semaines. Aube, la fille d'André Breton, est sortie de son silence pour expliquer comment elle avait dû se résigner à cette dispersion (Libération du 7 avril). Attaqué, Aillagon a souligné qu'il n'avait aucun pouvoir d'empêcher la vente. L'Etat avait déjà acquis les oeuvres les plus marquantes : était-il utile d'acheter le bric-à-brac de galets colorés ou de moules à gaufre, qui prenait son sens par le seul regard d'André Breton ?
Huées. Le ministre a tenu sa promesse d'enrichir les collections publiques : pulvérisant les records, l'Etat a préempté 335 fois, dépensant près de 15 millions d'euros. Soit un tiers, en valeur, d'une vente qui a rapporté en tout 46 millions d'euros. La bibliothèque Doucet a acquis tous les manu