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Libération

Jusqu'où iriez-vous pour Proust?

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Son fameux «questionnaire» est mis aux enchères à Drouot, mardi.
publié le 24 mai 2003 à 23h07

Le garçon là-bas, c'est Marcel, et les jardins sont ceux des Champs-Elysées. L'époque : vers 1885. Il y a quelques jolies filles dans la petite bande que fréquente ici Marcel Proust. Marie de Benardaky en particulier, dont le pré-ado va tomber raide dingue. Mais Marie (quelle idiote !) ne sera pas sensible à son charme, ceci ayant trois lourdes conséquences : le désespoir de Proust, l'écriture d'un nombre considérable de pages sur le personnage de Gilberte (dont Marie est l'une des composantes, dans la Recherche) et le début d'un virage vers l'homosexualité.

Mais pour l'instant, c'est Antoinette Faure la copine de Marcel. Cette jeune fille de bonne famille ­ fille du député Félix Faure, futur président ­ est vive et branchée sur l'air du temps. Donc anglomane. Elle a acheté rue de Rivoli, à la librairie anglaise Galignani, un petit album rouge dont chaque page reproduit le même questionnaire. Les amis d'Antoinette sont invités à y répondre à tour de rôle, exercice de dévoilement émoustillant. A la question «Your idea of misery ?», Proust (alors âgé de 14 ou 15 ans) avoue : «Etre séparé de maman.» Ou encore «For what fault have you most toleration ?»: «Pour la vie privée des génies.» Ou enfin, «Where would you like to live ?» : «Au pays de l'idéal, ou plutôt de mon idéal.» Ce sont les réponses les plus fameuses à ce que l'on appelle aujourd'hui «le questionnaire de Proust». Le reste des confidences nous donne une idée synthétique des goûts artistiques du futur écrivain, qui ne