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Libération
Critique

Dufy rentre au Havre

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publié le 31 mai 2003 à 23h12

Apollinaire affirmait : «Il est l'un des plus originaux et des plus habiles réformateurs des arts dont s'honore la France actuelle.» C'était en 1910. Raoul Dufy venait d'illustrer de trente bois gravés son Bestiaire ou Cortège d'Orphée, édition commencée par Picasso qui l'avait finalement abandonnée. Les contrastes du noir et du blanc, les hachures lumineuses et les motifs couvrant tout, niant la perspective, comblant l'horreur du vide, ont vite séduit Paul Poiret. Le couturier invite le peintre-graveur, havrais de 33 ans, à se lancer dans le tissu, lui qui avait d'abord tâté de l'impressionnisme, du fauvisme, avant de passer au cubisme. Ce sont ces croisements entre les pratiques artistiques du touche-à-tout Dufy que soulignent l'exposition, et la centaine d'oeuvres choisies entre 1906 et 1953, gouaches, huiles, céramiques, tentures, tapisseries, robes... Avec un accrochage plutôt heureux, car thématique : les baigneuses, la mer, les animaux, l'atelier et le modèle, Paris.

A visiter donc comme un jeu de piste. Au visiteur de pêcher les motifs récurrents chez cet artiste ancré dans le figuratif, dont le corpus iconographique peut se résumer à ce qu'il appelait lui-même l'«axiome découvert vers 1908 : couleur = lumière». Dès 1906, le corps est massif, la ligne sinueuse, l'espace plein : c'est la figure, monumentale, de Dufy. Puis, il découvre la dissociation forme-couleur en voyant un jour «une fillette courir sur le quai de Honfleur». La tache de la robe rouge était restée pl