Milhaud, Ibert, Jolivet lui devaient la création de certaines de leurs oeu vres. Et Bartok, Britten, Prokofiev et Stravinski de mémorables premières françaises. Mais Manuel Rosenthal, loin de cultiver sa légende dorée, continuait à 80 ans de servir la musique avec humilité. S'il avait été contraint d'abandonner l'enseignement au Conservatoire de Paris depuis 1974, il prodiguait encore avec passion ses conseils aux jeunes chefs qui venaient lui rendre visite dans sa maison de la Butte-aux-Cailles à Paris. Sa vie n'avait pourtant pas été facile...
Dès sa naissance, les médecins ne donnaient pas cher de lui. A 14 ans, la mort de son père le contraint d'abandonner la grande musique pour accompagner les premiers films dans les cafés afin de subvenir aux besoins de sa famille. Et enfin deux guer res, dont la deuxième faillit coûter la vie au juif, résistant puis prisonnier. Mais la musique, du violon que lui offre à 9 ans sa mère ayant fui les pogroms de sa Russie natale jusqu'aux orchestres qu'il va diriger, sera toujours là pour le sauver. Ce gosse du faubourg Saint-Antoine peut compter sur ses pairs : Maurice Ravel, qui l'adopte comme élève et dont il sera comme pour Milhaud et Stravinski, l'ami fidèle jusqu'à la mort. Puis Ingelbrecht, qui offre au jeune chef occasionnel des orchestres Pasdeloup et Lamoureux, de devenir son assistant au National de France.
De Moulin rouge, où cet élève de Jules Boucherit aura été premier violon, en Seattle dont il poussera l'orchestre symphoniqu