D'emblée se dresse la bibliothèque de la peinture. Des rangées d'«ouvrages de couleur» sont en effet accolées les unes aux autres, peintes les unes au-dessus des autres, construisant des étagères ou des étagements de couleur. Ce sont trois tableaux de Bernard Frize, Arrangement (2002), Karolin (2003), Aunno (2003). Frize traite la peinture comme Jorge Luis Borges la littérature, où, comme le remarque Maurice Blanchot, «le livre est en principe le monde pour lui, et le monde est un livre [...] où le monde et le livre se renvoient éternellement et infiniment leurs images reflétées» (1). Ici, aussi, la peinture recouvre le monde comme son double parfait.
L'exposition, qui s'étend sur presque un étage du musée d'Art moderne de la ville de Paris, est conçue et accrochée par l'artiste lui-même. Elle donne à feuilleter dix années de peintures, sans souci de chronologie, ni de format et, surtout, en dissociant le plus souvent les ensembles (pour ne pas dire séries). Même serrés les uns contre les autres, les tableaux s'apprécient d'abord comme des pièces uniques avant de découvrir de quelle logique ils procèdent et à quelle chaîne ils s'accrochent. L'artiste dit : «Une toile devrait permettre de deviner comment elle a été peinte, comme si on avait pu la réaliser soi-même» (1998).
Catégories. L'image produite dans Romani, 2002, est faite d'une marque colorée, appliquée sur la toile et descendue en suivant le trajet des marches d'un escalier sans lever le pinceau ; opération répétée en