Il y a quinze jours, Jean-Claude Biette présentait à Cannes son nouveau film, Saltimbank, en clôture de la Quinzaine des réalisateurs, aux côtés de ses acteurs, Jeanne Balibar, Jean-Christophe Bouvet et Jean-Marc Barr. L'accueil, chaleureux, le rendait joyeux. Il était heureux, avec sa manière mesurée, presque chuchotée, très subtile, de vivre pleinement ses sentiments. Dans la nuit de lundi à mardi, Jean-Claude Biette est mort, brutalement, à 60 ans, laissant désemparés tous ceux, nombreux, qui le tenaient pour l'un des plus grands critiques de cinéma et admiraient ses films, sept longs métrages et autant de courts, tous parlant d'une voix singulière.
Flâneur. Biette était parisien, un enfant, puis un homme, du XIe arrondissement, boulevard Voltaire, Ménilmontant, Belleville, et il aimait flâner, marcher, pour se retrouver, souvent, devant la papeterie de l'avenue de la République, regardant les découpages de la vitrine. Il rappelait parfois qu'il descendait de l'ingénieur Louis Biette, auquel on doit un viaduc sur la Seine. C'était aussi un voyageur, l'Italie, le Portugal, ou les côtes de l'Atlantique. Mais le vrai pays de Jean-Claude Biette, c'était le cinéma. Il y était entré adolescent, avec d'autres jeunes «cinéfils» du XIe, Serge Daney, Louis Skorecki: des centaines de films vus, des dizaines de salles fréquentées, le Nickel Odeon, le Mac Mahon, la Cinémathèque... Le port d'accueil de ces enfants adoptés par les films se trouvait sur les Champs-Elysées: les bureaux des