Christophe Gans, 43 ans, est l'un des meilleurs spécialistes du cinéma asiatique en France. A 22 ans, il participe à la création du magazine Starfix, dont il devient rédacteur en chef. En 1995, il signe son premier film, Crying Freeman, adapté du manga de Koike et Ikegami, puis, en 2000, le Pacte des loups.
Comment expliquer la vivacité du mythe Bruce Lee ?
Il y a évidemment la nostalgie de ma génération, qui l'a découvert, mais Bruce Lee est aussi un mythe qui fonctionne sur la jeunesse éternelle et la puberté. Il est par essence le héros de l'adolescence. Quand je l'ai découvert, à douze ans, ça a changé ma vie. A cause de lui, j'ai voulu faire du cinéma et ma thèse, au concours d'entrée, lui était consacrée. Il était un héros rebelle mais aussi, nouveauté, un corps, une sensualité, une arrogance exerçant une violence assumée. En plus, il était d'une race différente de la mienne et, pour couronner le tout, déjà mort. C'est très perturbant, un référent érotique, romantique et morbide. Pour l'éternité ! J'insiste sur cet aspect des choses : la morbidité, presque la nécrophilie, qui a poussé les adolescents du monde entier à lui vouer ce culte du regret.
Ses films, pourtant, ne sont pas des chefs-d'oeuvre.
Ce ne sont pas ses films qui ont tant marqué, c'est lui. Il n'y a pas de sens, pas de message, c'est sa puissance psychotique qui nous fascinait et qui fascine toujours. Le film que je préfère est la Fureur de vaincre, notamment parce qu'il meurt à la fin et que cela a été une