«Miles, Miles» crie un jeune homme, casquette visée sur la tête, croyant reconnaître, sur la scène du New Morning, le trompettiste légendaire du jazz. Mais Roy Hargrove, lui, est bien vivant. Comme Miles Davis, il est trompettiste, arbore des chemises colorées, a une silhouette fine presque fragile, et entre en osmose sur scène avec ses musiciens. Mais lui ne tourne pas le dos au public. «Miles était mon héros, dit-il avant le concert. Il avait une vision, l'art de bien s'entourer. Son utilisation de l'espace dans la musique est une autre source d'inspiration. On reconnaît ses morceaux même quand il ne joue pas de trompette, juste en écoutant la section rythmique.» La sienne n'est pas mal non plus : la basse de Reggie Washington gronde comme sur un disque de Run DMC. Les deux saxophonistes, Keith Anderson et Jacques Swartzbart, sont époustouflants, ainsi que les deux claviers, dont René Neufville que Roy Hargrove n'est pas peu fier de présenter devant une salle enthousiaste.
Egalement chanteur, René réinterprète (avec Eryhah Badu et Stephanie McKay) les chansons du dernier disque d'Hargrove, Hard Groove. Car, autres points communs, quelques semaines avant son décès en septembre 1991, Miles Davis avait enregistré Doo-Bop, un album mêlant au jazz les rythmes hip hop du producteur new-yorkais Easy Mo Bee, et il avait donné un concert au festival de Nice. «Le jeune lion du hard bop», comme on le surnomme dans les milieux autorisés, a sorti, début mai, un dixième album remarquab