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Libération

Dans les voiles

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publié le 24 octobre 2003 à 1h31

Colette disait que tout ce qu'on écrit finit par arriver. Houellebecq a écrit tout le mal que l'on pouvait penser des musulmans et cela semble arriver. Prenons ce livre, Bas les voiles ! 60 000 exemplaires sortis, à la surprise même de Gallimard, son éditeur. L'auteur, la Franco-Iranienne Chahdortt Djavann, a vécu voilée en Iran. Elle supporte mal de voir, en France laïque, des jeunes femmes affirmer leur identité par le tissu corbeau, des intellectuels défendre cette liberté d'afficher sa soumission. Le pamphlet fait quarante petites pages. Avant de l'ouvrir, on trouve que c'est court pour un livre. Après l'avoir lu, on trouve que c'est long pour un article. Mais ce n'est ni l'un ni l'autre : comme souvent aujourd'hui, c'est un cri. Le monde du silence n'est plus que pour les muets et les poissons. Les autres crient ou subissent les cris. L'espace public est à mi-chemin entre divan, gueuloir et boîte de nuit. On y entend le cri d'une mère ; d'un père ; d'un fils ; d'un beau-frère ; d'une grand-mère ; d'un cousin par alliance ; d'un ancien violé ; d'un nouveau veuf ; d'un père poule ; d'une prostituée transsexuelle ; d'un dépressif célèbre ; d'une femme voilée ; d'un mannequin anorexique ; d'un penseur qui a mal à la France. Chacun hurle sans fin à la vie, à la mort. C'est la démocratie, la citoyenneté par le cri. Comment juger ? Eh bien, à l'oreille. On écoute, jusqu'au moment où l'on n'entend plus. Les femmes-à-voile sont-elles aussi soumises ou mal dans leur peau que le d