Qu'est-ce qu'on vaut ? Quel est le prix de chacun ? Combien coûte un danseur, un classique, un contemporain, un trop gras, un homme-tronc ? Toutes ces questions, auxquelles le marché de l'art ne daigne le plus souvent pas répondre, sont posées dans The Cost of Living (le Coût de la vie), spectacle du DV8 Physical Theatre, groupe anglais qui ne mâche pas ses mots. Si, parfois, sa provocation n'a pas plus d'intérêt qu'un reality show vaguement décalé, comme ce fut le cas dans Bound to Please, le chorégraphe Lloyd Newson sait aussi taper juste quand il le faut.
Malin. Dans Enter Achilles, une pièce de 1995 assez éprouvante dans sa manière de mettre en scène le machisme ordinaire et de puer la bière, le corps devenait le mobilier des pubs. Dans The Cost of Living (2000), le corps-marchandise est étudié sous toutes ses coutures, souvent de façon légère, comme si on pouvait encore en rire, comme si les académismes fixant la valeur de chacun, de chaque petite star, n'étaient pas le pire qui pouvait arriver. Mais Lloyd Newson est un malin. En une heure et demie, il tord la médiocrité jusqu'à ce qu'elle n'en puisse plus et dégorge, contre toute attente, de scènes d'une cinglante beauté, de danses où les corps les plus incompatibles trouvent une forme commune, tel l'homme-tronc juché sur le dos d'une grande ballerine, interprétant un duo d'amour.
Tout commence par la prise en otages des spectateurs retardataires, qui sont livrés par groupes, houspillés par les acteurs. La scène est une