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Libération
Critique

Au Plateau, la peinture plein pot.

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publié le 3 novembre 2003 à 1h41

Se damner pour un petit pan de Tal Coat (de son véritable nom Pierre Clohars-Carnoët, 1905-1985) : le tableau, d'à peu près 20 cm de côté, est presque monochrome, vert avec une bande vert jaune. La pellicule de peinture verte est palpable, car elle plisse un peu et décolle de son support. Vert sur verre : pour un peu, on aurait envie de piquer la couche picturale et de s'en recouvrir le visage, devenir à son tour maître verrier du tableau. Mais en face du Tal Coat, rayonne un phare pictural d'une intensité équivalente : Quatuor JF d'Aurélie Nemours (93 ans) est, lui, composé de quatre carrés jaunes sans modulation en un seul tableau rassemblés, formant une croix par leurs interstices. La rencontre est physique, mais, très vite, la confrontation visuelle est déplacée, élevée, relevée.

Ces deux expériences de la peinture, quoique leur date de fabrication (1981 pour le premier tableau, 1988 pour le second) relève grosso modo de la même décennie, ne se comparent pourtant pas. Un tableau n'en vaut pas un autre, et aucun des deux ne résout «la» question, obéissant mieux que l'autre à une définition pressante de la peinture qui viendrait écraser toutes les autres.

Inversion positive. Dire qu'Eric Corne, le commissaire de cette exposition et responsable des lieux (le Plateau, centre d'art contemporain des Buttes-Chaumont), en tient une couche n'est peut-être pas lui faire injure. Sous l'égide du «Voir en peinture», c'est son titre, sorte d'inversion positive d'une expression communéme