On a fixé l'horodateur dans une rue du centre de Paris, à la frontière entre le quartier du Sentier et celui de Montorgueil. Devant lui, des hommes en élégants costumes de nerfs gris et froissés croisent des porteurs pakistanais louant leurs diables à dieu sait qui. De jolies petites marchandes de fringues aux jambes d'allumette croisent de longues caravelles de chair pâle jaillissant des meilleures boutiques. Les premières hissent, portable en main, le pavillon d'un bronzage résistant à l'hiver qui vient. Les secondes fendent l'écume des hommes, menton haut, avec un dédain de Samothrace. Les unes et les autres ne regardent personne. Elles refroidissent dans leurs parfums et dans les lueurs acier du soleil couchant de la rue Réaumur. Un couple de jeunes bourgeois centre-urbains pousse ses enfants vers Halloween : ce sont les parents qui portent les masques. Les conducteurs garés paient l'horodateur sans même le regarder. A tous, la machine dit quelque chose, mais ils passent vite, sans l'écouter. L'affichette a été imprimée, collée et isolée avec soin sur son profil gauche. On lit : «UN GRAND MERCI à celle ou à celui qui a pris le temps de ramasser et de renvoyer mes papiers trouvés dans cette rue le 24 octobre dernier. Vous contribuez à une société meilleure ! (Ces papiers étaient dans ma sacoche volée quelques heures auparavant dans le coffre de notre voiture). L.A.» «L.A.» passe une petite annonce de remerciement sur l'horodateur de la ville. A moins qu'il y dresse une pl
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