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Libération
Critique

Les trois W des Abbesses

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publié le 28 novembre 2003 à 2h05

Quand Eric Landau est rentré à Paris en 1997, après sept années passées en Andalousie, il s'est posé place des Abbesses, avec sa valise. Ce village montmartrois, «à moitié saint (car le Sacré Coeur), à moitié pute (car Pigalle)», Landau l'a scruté, l'a aimé de toutes les terrasses des cafés, côté ombre côté soleil, entre art brut de la halle Saint-Pierre et Bateau lavoir... Cet hidalgo-parigot de 43 ans, aux costumes bariolés, qui a été globe-trotter au service de l'art contemporain, de New York à Beaubourg, de Lausanne à Cadaquès, a soudain anticipé le quartier : faire revivre un art vivant, comme dans les années 20, sur cette place touristique, toujours très commerçante, mais un peu endormie, et qui risquait d'être complètement «poulbotisé» ou «embourgeoisée». Il rêvait d'inventer des ponts entre des artistes et les acteurs de ce triangle Lepic-Abbesses. On aurait pu penser qu'il était une peu mégalo, un peu pape des Abbesses !

Une tribu qui sait faire la fête. En 1998, il ouvre un premier lieu minuscule, rue Burq, où s'inscrit le sigle W sur un simple calicot. Pourquoi W ? Car c'est une lettre de l'alphabet, elle appartient à tout le monde. Rue Burq explosent très vite les couleurs et les signes du premier artiste défendu : Sid Ali. Les affiches de cet ancien activiste urbain sont placardées sur des agences immobilières, et Sid décore les colonnes du café d'en face, le Chinon. S'immisce là une définition de l'artiste : «Un ethnologue un peu psy, un sorcier dans un village