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Libération
Critique

Les bijoux du camelot Bola de Nieve

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publié le 15 décembre 2003 à 2h20

Pour qui a plus d'une paire d'oreillettes au coeur, la réédition de 33 chansons de Bola de Nieve, l'un des grands musiciens cubains du siècle passé, est un événement intime marquant la saison d'une délicatesse de feuille morte. Ces airs ont été enregistrés à Cuba dans les années 50 et 60. Bola s'y accompagne seul au piano, comme à son habitude. Il a 40, 50 ans. Il choisit de rester à Cuba après la Révolution, qu'il soutient. Très connu, il voyage dans les pays de l'Est, en Amérique latine, en Europe occidentale. Il joue dans un cabaret fameux de La Havane situé face à l'hôtel Nacional : Le Monseigneur, rebaptisé Chez Bola. Alejo Carpentier, Pablo Neruda, Rafael Alberti, Nicolas Guillén, Camilo José Cela admirent son art de vivre la chanson. En 1971, il rêve qu'il meurt à Mexico, que son corps est transporté à La Havane et veillé pendant 24 heures, comme on le fait à Cuba, par tous ses amis. Il raconte ce rêve et, quelques jours plus tard, meurt effectivement à Mexico, d'un arrêt cardiaque. Il était diabétique, fatigué, les artères finies, aussi bon que jamais. Il allait chanter au Pérou. Ses amis le veillent, au son de ses chansons, dans le funérarium dont il avait rêvé.

Quelque chose de Mama Inès. Soixante ans plus tôt, Ignacio Jacinto Villa Fernandez naît à Guanabacoa, bourg historiquement fameux, situé aujourd'hui dans la banlieue de La Havane. La famille compte treize enfants ; six survivront. Le père est cuisinier dans un centre d'accueil. La mère, Inès, formidable cuisi