Dans la journée, c'est un café de quartier comme les autres. Les commerçants du bas de Belleville, coiffeurs, vendeurs de merguez-frites, viennent y prendre leur café. Quelques étudiants y potassent leurs cours. Ali, le serveur, est là depuis 1976, et doit composer avec les indécrottables «pochetrons». Le soir, le patron, Momo, 34 ans, prend les commandes du zinc, et là c'est une autre histoire. Capitaine vissé derrière son comptoir qui ressemble à la coque d'un paquebot, Momo allume l'éclairage de l'arrière-salle, la boule à facettes de discothèque et les loupiotes des cinq billards français et américains au tapis bleu. Ce qu'il reste des neuf billards de l'enseigne et de la grande époque à la fin des années 50. Le tapis vert étant passé de mode, il a fallu faire de la place pour la piste de danse. Près de 150 m2 de parquet usé, patiné par le temps, quelques chaises qu'on suppose récupérées chez Emmaüs, et de grands miroirs le long des murs couleur crème, décorés par des peintures : une femme des années 30 pose sur un ballon de foot, un portrait de Piaf, un autre de Zidane avec un faux autographe, une illustration de Moby Dick et des avertissements : «Interdit de jeter les mégots sur la piste de danse car les dames se brûlent les pieds.»
Euphorie. Le lundi, c'est tango, le mercredi, jazz, et le vendredi, les DJ de l'association Goldrush sont aux platines. Depuis deux ans, l'équipe de Guido, l'Argentin, a réussi à faire de cette classieuse salle de billard à la déco rétro un