«Et si ma muse s'émancipe/ A chanter un nouveau Philippe/ C'est pour que la Postérité/ Sache qu'on doit à notre Ville/ Le Pâtissier le plus habile que la terre ait jamais porté.» Signée «un amateur», en fait un avocat spirituel et bon vivant, Collin d'Harleville, cette «Nouvelle Philippique» cause quelque émoi quand elle est publiée le 6 mars 1782 par la Feuille de Chartres. Elle encense le «plus délicieux des pâtés», celui de Chartres bien entendu. Le 20 mars, un concurrent, le sieur Lemoine, épaulé par le poète Nicolas-François Guillard, réplique par cette amère épître : «Es-tu donc, dans ces murs, l'unique Pâtissier digne d'un tel encens ? On te proclame Dieu de la Pâtisserie ! J'ai cru longtemps que ce pompeux Eloge et tous ces Complimens étaient un malin persiflage d'un Poète railleur, qui comptoit, en louant tes rares qualités, recevoir, en échange, un de tes bons Pâtés...» Ainsi, déjà à l'époque, l'intégrité de la critique gastronomique était-elle suspectée. Et, du reste, Lemoine rapporte qu'il a obtenu la publication de ses vers en offrant un pâté à la rédaction. Philippe répond au mois de mai. Il use (déjà !) de l'opposition du chef qui préfère ses fourneaux à celui qui court les gazettes : si le délai paraît long, c'est qu'il avait, lui, des pâtés à enfourner, et qu'il attendait le Carême pour se consacrer à la poésie. «Je n'ai ni tes loisirs, ni tes talents divers, et sais faire un peu mieux des Pâtés que des Vers.» Aujourd'hui, le pâté de Chartres figure à la car
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