Au 25, sombre restaurant enfoncé dans le Méridien Montparnasse, au terme d'un repas éminemment sympathique concocté par Christian Moine, il est très difficile de répondre par la négative quand vient l'offre des fromages. Gérard Poulard affiche une mine si catastrophée qu'il faudrait avoir un coeur de pierre pour persister : c'est sûr, le malheureux va se jeter par la fenêtre. Conscient des regards offensés que lui jettent les habitués, l'esprit récalcitrant peut toujours hasarder : «Un petit, alors...» Et c'est parti. L'infortuné craignant l'indigestion finira par une assiette d'une demi-douzaine de fromages de sa préférence. A ce stade, il s'est rendu compte qu'il était impossible d'interrompre le discours fleuri du maître d'hôtel, qui lui fait parcourir les cols enneigés et les prairies fleuries pour lui servir des portions bien trop généreuses. Ravi, il peut alors découvrir ces précieux produits fermiers que Gérard Poulard a dénichés au fil de ses pérégrinations.
Les fermières. On pourrait l'appeler sommelier de fromage (1). Il a préféré inventer le nom de «fromagier» (marque déposée). Ses vacances, quand il ne les passe pas à faire des démonstrations à des Japonais ébahis dans les hôtels exotiques de la chaîne, il les consacre à survoler vallées et alpages avec son fils pilote pour dénicher les fermes isolées. Il s'y rend ensuite pour déguster, se lier d'amitié (fondamental), et, l'épreuve rendue, passer commande. Chaque fromage détient sa fiche d'identité, complétée d'un