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Libération

La Cantate

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publié le 28 mai 2004 à 0h48

A la rentrée 2003, on se demandait où avait bien pu se nicher «la chanson du geste» de Bertrand Cantat. Autrement dit, le morceau manquant, le titre introuvable de la discographie de Noir Désir. Celui qui contiendrait les ressorts cachés du meurtre de Marie Trintignant, son code inconnu, prémonitoire et subliminal. Il devait forcément être gravé quelque part telles ces voix sataniques audibles sur les vieux vinyles des Beatles si on les «scratche» à l'envers (disait la légende). Evidemment, on n'arrivait à rien. Sinon à un hit sauvage, intime et médiatique, composé de bribes signifiantes éparses : le premier nom du groupe bordelais (Psychoz), les chansons prescientes (Sweet Mary, Danse sur le feu Maria...), les refrains annonciateurs («Nous les écorchés vifs/ On en a des sévices»), les ironies du sort (Veuillez rendre l'âme à qui elle appartient, les Yeux vers l'Est), les calembours cathartiques («Supertrempe»), etc. Dix mois plus tard, la «Cantate» finale, celle que tout le monde attendait, existe bel et bien. Il s'agit de Nous n'avons fait que fuir. Un long poème rock de 55 minutes, improbable synthèse d'une performance distordue de Sonic Youth et d'un concert engagé de Léo Ferré à la Mutualité. Il a été joué et enregistré le 21 juillet 2002 au Festival de Montpellier -Radio France. Noir Désir y était invité par France Culture pour réaliser un concert unique. Les éditions Verticales et la station de radio s'apprêtaient à coéditer le livret + le CD, lorsque le drame survint