Jacques Cagna est un sympathique cuisinier au visage rond toujours souriant, au nez pointu et à l'air malicieux, installé depuis près de trente ans rue des Grands-Augustins. Dans un hôtel particulier du XVIIe siècle, entouré de tableaux de petits maîtres flamands, il offre une cuisine classique plutôt sage dans un établissement couronné des deux macarons par le Michelin dès 1978. En face, dans la maison où la Bruyère composa ses Caractères, il ouvre l'Espadon Bleu, consacré à la cuisine des poissons, à des prix fort raisonnables. Aux commandes, Julien Logereau, son neveu de 28 ans.
Cuisson exacte. L'espadon est un de ces grands poissons qui passent pour être à la mode, à la couleur du veau et à la texture encore plus resserrée. Il ne peut prétendre à la finesse des poissons blancs de nos côtes. La cuisson doit en être exacte, faute de quoi il se dessèche très vite. Ici, il est rapidement grillé, avec un jus de viande qui relève cet apparentement hybride. Plus originale, la barbue est cuite à «la plancha» accompagnée d'endives sans qu'une légère caramélisation ne vienne déranger ce bel équilibre.
Jacques Cagna est honnête homme. Quand il ne peut inscrire un poisson sauvage ou un homard breton à sa carte, pour des raisons d'approvisionnement ou afin de maintenir des prix accessibles, il prend soin d'en mentionner l'origine. Sa daurade, «label rouge» quand même, ne démérite pas avec un chou au beurre blanc (qui pourrait se passer de lardons). L'aïoli, de cabillaud comme il se doi