A force de côtoyer la mythologie et les dieux de l'Hellade, Jacques Lacarrière s'est patiné un visage olympien. Celui d'un Hermès débarrassé de son aspect juvénile, s'amusant à transmettre les messages des dieux et des héros oubliés au fil des siècles. Ou bien celui d'un Dionysos patelin et assagi, revenu des bacchanales mais dont le regard bleu égéen s'attarde encore sur les jeunes passantes. Ou encore celui d'un pâtre soulagé du labeur, goûtant à la joie contemplative du repos.
La Grèce, l'écrivain la fréquente depuis le lycée. Elle lui saute aux yeux par la magie de l'alphabet où certaines lettres évoquent les boucliers des illustres guerriers partis se battre sous les remparts de Troie. Il caresse aujourd'hui l'envie d'écrire le pendant de l'Iliade, l'histoire de cette guerre mais vue du côté des vaincus. «A l'école, sous l'Occupation, nous commencions par la mythologie grecque qui nous prouvait que l'on pouvait dévoiler un sein, parler d'amour, évoquer les corps sans que cela soit un péché. Ce mot de péché m'a toujours révulsé.»
Rien ne le prédisposait à devenir un écrivain voyageur, un musardeur lettré, curieux et amoureux des chemins de traverse. Un père comptable dans une entreprise de charbon qui quitte sa Bourgogne natale pour s'installer à Orléans, une mère au foyer. La lecture découverte à 9 ans grâce au Village aérien de Jules Verne. Un parcours d'enfant de la laïque qui fredonne encore : «Gloire et honneur à l'école laïque qui nous a appris à vivre et à penser li