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Libération
Critique

Michel Galabru, un seigneur chez «les Rustres»

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Théâtre. A Paris, Goldoni mis en scène par Joffo. Inusable.
publié le 21 septembre 2004 à 2h13

Michel Galabru est peut-être la dernière forge en activité du théâtre français. A 80 ans (il est né le 27 octobre 1924), il n'a certes plus toutes ses dents, mais il sait ce que feu veut dire, et pour marteler les mots quand ils sont chauds, sa gorge en connaît un rayon.

Quand il entre sur la scène du théâtre Saint-Georges, la pièce - les Rustres de Goldoni - est déjà commencée, le public, chauffé à blanc par une vieille histoire de famille (fille à marier, père pingre et autoritaire, etc., Goldoni touille un vieux pot sachant que son métier y fera une bonne soupe), attend son entrée. Le voici. Pas du tout cabot à mimiques, mais étonnamment vulnérable sur des jambes de gandin, économe de ses gestes. La voix n'est pas encore là, elle gît sous ses braises. Galabru souffle dessus en avalant l'air, en raclant sa gorge, et la voilà qui jaillit en grondant murmure, brûlante de pierres chaudes, rugissante du dedans, cependant toujours contenue : il lui faut tenir cinq actes sans entracte.

Le privilège du grand acteur fait qu'il semble ne pas marcher en scène, mais y danser d'un pas léger et c'est ce qui se passe, même si la bedaine de Galabru s'interpose entre ses jambettes et son visage aux vallonnements émaciés par le temps. Rien d'appuyé, une saga de gestes esquissés (le sourcil qui se soulève, le menton qui part à l'assaut) et de borborygmes aux angoisses magnifiques («Hééééééé ???») car chez l'acteur l'esquisse suffit à l'accomplissement. Sans oublier des «Alors là !» qui n'en f