On avait fini par croire invincible le patriarche du comic book américain ou, pour mieux dire, la figure tutélaire de la bande dessinée, père du mythique Spirit, conteur perpétuellement régénéré par une faconde graphique sans pareille. Will Eisner naquit à New York, dans le Bronx, le 6 mars 1917, d'une mère roumaine et d'un père autrichien, peintre paysagiste devenu décorateur au théâtre yiddish de Manhattan.
Le jeune garçon sera d'abord vendeur de journaux dans Wall Street. «A cette époque, j'étais un lecteur avide de romans et de nouvelles, découvrant avec passion Maupassant, O'Henry, Saki et Ben Hecht, mais aussi les Pulps.» Ces influences, mêlées à d'autres, les strips de Flash Gordon, Terry et les Pirates et Prince Valiant, déclenchent une vocation de cartoonist qui s'épanouit dans les pages du journal de son collège.
Eprouvant quelque difficulté à franchir le seuil des studios de dessin, l'impétrant travaille au service publicité du New York American. Il y fait la connaissance d'un certain Jerry Iger, avec lequel il lance Wow, un magazine éphémère. Mais, bientôt rejoints par Bob Kane (le futur créateur de Batman) et Jack Kirby, ils créent un studio indépendant pour lequel Eisner multiplie les pseudonymes : Erwin Willis, Willis Nerr...
Originalité et malice. En 1939, le Des Moines Register Tribune lui commande un supplément de seize pages dans lequel Denny Colt, alias The Spirit, fait sa première apparition le 2 juin de l'année suivante. Ce personnage hors du commun dans l