Jeudi 6 janvier (j-18), 10 heures.
Ambiance archidétendue au siège de la maison Lesage, qui occupe tout un étage d'un immeuble discret du IXe arrondissement de Paris, à deux pas de l'hôtel des ventes Drouot. Au gré des couloirs de ce labyrinthe de 600 m2, suite d'appartements à parquets et moulures typiquement parisiens, François Lesage, 76 ans, claque des bises à chacun dans le sillage de son cigarillo. Plus pater familias que démiurge rongé par l'angoisse à l'approche du gong. «Pour l'instant, on n'a que ce patronage pour Chanel», l'informe une assistante. Lui regarde d'un oeil amoureux le dessin, une longue robe blanche parsemée de roses : «C'est beau, n'est-ce pas ?»
Sous ses yeux, une jeune femme procède à l'identification détaillée des broderies de la robe : perles, paillettes, fils, couleurs... Une fiche illustrée d'un exemplaire de chaque élément en découlera, à charge ensuite à l'atelier fournitures de préparer le matériel pour les brodeuses. «Tout est manuel, fait remarquer Nathalie Vibert, attachée de presse de la maison. Aucun document informatique ne saurait rendre la couleur exacte de telle perle ou paillette.» De fait, étagères et tiroirs en bois de l'atelier fournitures offrent des palettes sidérantes, caverne d'Ali Baba aux étiquettes parfois ésotériques pour le commun des mortels : «cannetille», «soutache», «albène», «chrysolite», «morion», «chalkurte»...
Dans la pièce voisine, Anne-Marie, une dessinatrice, s'escrime sur le patronage d'une somptueuse robe turq