La mode, ça rend bête. Un petit tour aux défilés suffit pour comprendre que tout un podium ne fera jamais un cerveau. Atroce médisance. Pour se convaincre que réflexion peut rimer avec talons et chiffons, il suffit de s'intéresser à la collection coéditée par l'Institut français de la mode (IFM) et les Editions du Regard. On y trouvera une biographie de Rose Bertin, la modiste de Marie-Antoinette, ou l'ensemble des articles de Roland Barthes sur l'apparence, rassemblés dans Le bleu est à la mode cette année. Sociologie, littérature, économie, management... Une dizaine de titres est déjà disponible (1). Bruno Remaury, prof à l'IFM, auteur du Beau Sexe faible (Grasset), et initiateur de cette collection a su se rappeler sa formation en anthropologie sociale. Son livre questionne les marques, et pas seulement les grands noms de la mode, qui ont apposé leurs griffes sur notre imaginaire. Comment ont-elles vampirisé des récits mythologiques ou littéraires (la fontaine de Jouvence pour Evian, ou Gatsby le Magnifique pour Ralph Lauren). Bruno Remaury passe également au crible trois marques françaises fortes, Chanel, Dior et Yves Saint Laurent, comme autant de visions de l'éternel féminin. Rapidement résumé : Chanel, c'est la reine, Dior, la princesse, et chez Saint Laurent, la séductrice. Difficile de ne pas être d'accord avec l'auteur lorsqu'il pointe que, «dans l'imaginaire contemporain de la consommation, l'adulte n'est tolérable qu'à condition qu'il se transforme en enfant».
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