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Libération
Critique

Bourreaux de travail

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publié le 8 avril 2005 à 1h36

La société d'édition DVD blaq out s'est créée fin 2002 avec un objectif salutaire : «Offrir à des films d'auteur, français ou étrangers, la seconde vie qu'ils méritent, sur un support de qualité et au contenu enrichi.» Autrement dit, concrétiser «la revanche de l'auteur sur les impératifs commerciaux de l'exploitation en salles actuelle» où la rotation accélérée des films (au moins dix nouveautés par semaine) pénalise les petites productions indépendantes. Trois Huit, de Philippe Le Guay, disparut ainsi trop vite de l'affiche malgré un sujet qui, en 2001, faisait la une des hebdomadaires : le harcèlement moral au travail.

Sadisme. Courageux, Philippe Le Guay n'a pas abordé ce grand «sujet de société» sous l'angle convenu du rapport de classe entre le «méchant» supérieur et le «gentil» subordonné. Il a, au contraire, fait de son bourreau et de sa victime deux égaux. Pierre, ouvrier consciencieux et aimé de tous, intègre l'équipe de nuit dans une usine de bouteilles : il se retrouve bientôt moqué, puis de plus en plus sadisé par son «camarade» Fred. Jusqu'à voir son équilibre psychique et sa cellule familiale mis en danger... Trois Huit devient alors un suspense social, où la description en apparence naturaliste du travail en usine frôle parfois le fantastique.

Dérangeant. Bien écrit (le commentaire audio de Philippe Le Guay donne de précieuses informations sur les enjeux et les scènes non retenues du scénario), le film puise sa force dérangeante dans la confron- tation d'acteur